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Scolytes : menace sur les forêts de résineux

Photo du rédacteur: Etats SauvagesEtats Sauvages

Les scolytes sont de petits insectes de l’ordre des coléoptères qui attaquent les arbres en forêt, notamment les épicéas et les pins. En creusant des galeries sous l'écorce, ils affaiblissent les arbres, pouvant les mener jusqu’à la mort. Leur propagation a été facilitée par des facteurs humains et environnementaux, comme les importations accidentelles et le réchauffement climatique, ce qui accentue leur impact sur les forêts françaises. En réaction, la nature lutte avec des prédateurs et des champignons, et la France met en place des stratégies pour les contrôler, comme la surveillance, l’abattage des arbres infestés et des solutions écologiques.


 

Galeries de scolytes


Description, origine et écologie des scolytes


Les scolytes, ou Scolytinae, sont une sous-famille d'insectes de l’ordre des coléoptères (dans lequel se trouvent également les scarabées, les coccinelles ou encore les charançons). Ces insectes mesurent généralement entre 2 et 10 mm de long, avec un corps allongé et souvent cylindrique. Leur couleur varie du brun au noir, et leurs ailes sont recouvertes d'une fine couche de poils. Ces petits coléoptères sont principalement connus pour leurs habitudes parasitaires sur les arbres, en particulier les résineux (principalement les épicéas et les pins), bien qu'ils puissent également attaquer certaines essences feuillues.


Scolyte
Le scolyte Ips typographe, Ips typographus

Les scolytes sont des insectes xylophages, c'est-à-dire qu'ils se nourrissent de bois. En creusant des galeries sous l’écorce des arbres, ils nuisent à la circulation de la sève et entraînent un affaiblissement, voire la mort de l’arbre affecté. Ils ont également un impact sur l’écosystème forestier, car leurs attaques favorisent la dégradation du bois et la propagation de pathogènes tels que des champignons ou des nématodes.


Les scolytes ont évolué en étroite relation avec les forêts, où ils occupent un rôle écologique de décomposeurs en s'attaquant aux arbres morts ou affaiblis. Ils proviennent principalement d'Asie, d'Amérique du Nord et d'Europe. Cependant, certaines espèces étaient déjà présentes en Europe avant l'arrivée de l'Homme, tandis que d'autres ont été introduites plus récemment. Leur présence en France est donc le résultat de plusieurs facteurs.


Certaines espèces de scolytes, comme Ips typographus (le scolyte typographe), sont natives d'Europe. Elles attaquent principalement les résineux comme le pin, le sapin ou l'épicéa. Leur présence en France date de plusieurs siècles et elles ont naturellement évolué dans cet environnement. En revanche, d'autres scolytes, comme Dendroctonus micans, originaires d'Asie ou d'Amérique du Nord, ont été introduites en Europe par le biais du commerce du bois, des transports ou des échanges commerciaux. Aujourd'hui, ces insectes causent de graves problèmes aux forêts françaises, car ils n'ont pas de prédateurs naturels dans l'écosystème, ce qui leur permet de proliférer rapidement.


Ces dernières décennies, le réchauffement climatique a favorisé la propagation de certaines espèces de scolytes en Europe. Les hivers moins froids permettent à ces insectes de survivre plus longtemps, et leur reproduction peut se produire en plus grand nombre, et de manière plus précoce (les œufs pouvant éclore dès le mois de mars), augmentant ainsi leur impact sur les arbres. De plus, les arbres affaiblis par des sécheresses ou des stress environnementaux sont plus vulnérables aux attaques de scolytes.


Le cycle de développement des scolytes varie légèrement selon les espèces, mais implique plusieurs étapes : l'hibernation, la reproduction, la ponte, le développement larvaire, la transformation en adulte et l'émergence des nouveaux insectes. Ce cycle peut être relativement rapide, ce qui leur permet - lorsque les conditions sont favorables - de se multiplier rapidement et de causer des dégâts considérables aux forêts.


Cycle de développement des scolytes
Cycle de développement du scolyte Ips typographus


Période d'hibernation (hivernation) : Les scolytes adultes passent généralement l'hiver dans l'écorce des arbres, dans des fissures ou sous des écorces tombées au sol. Pendant cette période, ils sont en dormance, protégés des conditions climatiques rigoureuses. Cette phase peut durer plusieurs mois, souvent de l'automne jusqu'au printemps suivant, en fonction des conditions climatiques.


Reproduction et ponte : Lorsque les températures augmentent au printemps, les scolytes adultes émergent de leur état d'hibernation. Après leur émergence, les scolytes adultes s'accouplent généralement sur les troncs des arbres hôtes, principalement les résineux (comme les pins et sapins). Après l'accouplement, les femelles creusent des galeries sous l'écorce des arbres pour y pondre leurs œufs. Ces galeries sont souvent en forme de "S" ou de "Y" et se trouvent principalement sous l'écorce des arbres affaiblis ou stressés.


Développement des larves : Les œufs pondus par les femelles éclosent généralement en quelques jours. Les jeunes larves se nourrissent du bois sous l'écorce. Elles creusent des galeries dans le cambium, la couche qui se trouve juste sous l'écorce et qui est riche en nutriments. Cette activité perturbe la circulation de la sève et affaiblit encore l'arbre. Les larves se développent pendant environ 2 à 6 semaines, en fonction de la température et des conditions environnementales.


Nymphe et transformation en adulte : Après avoir consommé une grande partie de l'écorce, les larves se transforment en nymphe. Ce stade peut durer quelques semaines, au terme duquel elles se transforment en adultes. Les scolytes adultes émergent de l'écorce de l'arbre, où ils se préparent à partir à la recherche d'un autre arbre à infester. Cela peut se produire en fin d'été ou au début de l'automne.


Une fois adultes, les scolytes peuvent alors entamer un nouveau cycle de reproduction, attaquant de nouveaux arbres, ou retourner à leurs hôtes actuels. Les conditions de l'arbre et de l'environnement (comme le stress hydrique ou la température) influencent fortement leur activité et la propagation de l'infestation. Le cycle complet peut prendre entre 1 et 2 générations par an, selon l'espèce et les conditions climatiques. Certaines espèces, comme Ips typographus, peuvent avoir plusieurs générations par an dans des conditions favorables (par exemple, une année chaude et sèche).


Les scolytes jouent un rôle clé dans le fonctionnement des écosystèmes forestiers en accélérant la décomposition du bois et en favorisant le recyclage des nutriments. Lorsqu’ils colonisent un arbre affaibli, leurs galeries interrompent la circulation de la sève, ce qui provoque la mort de l’arbre et amorce un processus de dégradation du bois. Cette décomposition est facilitée par les champignons lignicoles que les scolytes transportent sur leur corps et qui se développent dans les tissus de l’arbre, modifiant sa structure et rendant le bois plus accessible à d’autres organismes saproxylophages. Ces interactions profitent à une multitude d’espèces : les larves de coléoptères se nourrissent de scolytes, tandis que des guêpes parasitoïdes pondent dans leurs larves. Les cavités laissées par les galeries deviennent des abris pour des insectes auxiliaires et des micro-organismes, tandis que les pics et autres oiseaux insectivores se nourrissent des adultes et des larves sous l’écorce. En forêt naturelle, ce processus régule la dynamique des peuplements en éliminant les arbres les plus vulnérables, favorisant ainsi le rajeunissement et la diversification des habitats.



Symptômes et dégâts engendrés par les scolytes


Les scolytes se distinguent des autres insectes xylophages par leur capacité à attaquer des arbres en bonne santé, particulièrement lors des périodes de stress environnemental comme les sécheresses ou les vagues de chaleur.


Symptomes et dégats des scolytes
Symptômes des attaques de scolytes.

Le principal symptôme de l'infestation par un scolyte est l'exsudation de résine sur le tronc de l'arbre, parfois accompagnée de petits trous visibles sur l'écorce. Ces trous correspondent aux galeries que les adultes creusent pour déposer leurs œufs. Lorsque les larves éclosent, elles creusent elles aussi des galeries supplémentaires, ce qui entrave la circulation de la sève. Les attaques répétées d’une colonie de scolytes peuvent rapidement déstabiliser l’arbre. Ce dernier finit par se dégrader, se dessécher et mourir en quelques mois.


Forêt de Darney (Vosges)
Forêt de Darney (Vosges)

Ces attaques peuvent entrainer des pertes économiques, écologiques et sanitaires. En effet, les pins sylvestres, les épicéas ou encore les sapins sont des espèces particulièrement vulnérables. Les scolytes s'attaquent aussi bien aux arbres isolés qu'aux peuplements forestiers denses, ce qui peut entraîner une propagation rapide de l'infestation à grande échelle, engendrant ainsi des pertes économiques significatives dans les forêts de production. Les dégâts causés par les scolytes ne se limitent pas à la perte de bois commercialisable. En forêt, la chute d'arbres affaiblis ou morts peut perturber l'écosystème, affecter la biodiversité, et modifier la structure de la végétation. Par ailleurs, la propagation des scolytes contribue à l’augmentation de la vulnérabilité des forêts face à d’autres risques (incendies, maladies ou pathogènes).


Impacts sur les forêts
Ravages des forêts d’épicéas par des scolytes

En France, la prolifération des scolytes dans les épicéas a été largement favorisée par des plantations inadaptées, notamment hors station, c’est-à-dire en dehors de leur aire de répartition (En France, l'épicéa est autochtone dans le Jura et les Préalpes du Nord). Lorsque ces arbres sont installés sur des sols trop secs, pauvres ou en basse altitude, ils deviennent plus vulnérables au stress hydrique et aux attaques de ravageurs. Les scolytes, attirés par ces arbres affaiblis, se multiplient rapidement et creusent des galeries sous l’écorce, interrompant la circulation de la sève et entraînant la mort des épicéas. Ce phénomène est aggravé par les pratiques sylvicoles intensives qui favorisent la monoculture et l’uniformisation des peuplements : en plantant des épicéas sur de vastes surfaces homogènes, sans diversité d’essences ni d’âges, les forestiers ont involontairement créé des conditions idéales pour la propagation des scolytes. Lorsque l’un des arbres est infesté, l’absence de barrières naturelles comme d’autres essences plus résistantes ou une structure forestière plus hétérogène permet aux insectes de se propager rapidement, transformant ces plantations en foyers épidémiques.



Ennemis naturels et moyens de lutte contre les scolytes


Face à l’invasion croissante des scolytes, plusieurs stratégies de lutte sont mises en œuvre. Ces stratégies incluent à la fois des approches naturelles et humaines, mais aussi une gestion préventive des forêts.


Les ennemis naturels des scolytes sont les prédateurs, les parasites et les pathogènes. Les prédateurs sont généralement plus gros que leurs proies et ont besoin de plusieurs proies pour se développer. Par exemple, les coléoptères prédateurs, tels que le grand charançon, se nourrissent des scolytes, en particulier des larves. Les parasites sont généralement plus petits que les espèces qu’ils affectent, et n'ont besoin que d'un seul hôte pour se développer. Souvent, on distingue les parasitoïdes (par exemple les guêpes ichneumon) des parasites réels (par exemple les puces). Alors que ces derniers vivent en parasites à tous les stades et affaiblissent au maximum l'hôte, les parasitoïdes ne parasitent leur hôte que sous forme de larves, mais le tuent dans tous les cas. Par exemple, certaines espèces de mouches parasitoïdes, pondent leurs œufs à l'intérieur des galeries des scolytes. À leur éclosion, les larves se nourrissent des scolytes eux-mêmes, contribuant ainsi à limiter leur population. Enfin, d’autres agents de lutte biologique incluent des pathogènes tels que les champignons entomopathogènes comme le Beauveria bassiana, et des bactéries, qui infectent et tuent les scolytes. Cependant, ces mécanismes naturels ne suffisent pas toujours à contrôler efficacement les populations de scolytes, en particulier lors d’infestations massives. C’est pourquoi, en complément de la lutte biologique, des méthodes de lutte chimique peuvent être utilisées, bien que leur usage soit limité et contrôlé en raison de leurs impacts environnementaux.


La lutte mécanique est également envisagée, consistant à couper les arbres infestés pour empêcher la propagation des scolytes au restant du peuplement. L'abattage doit être effectué avec soin pour éviter que les scolytes ne se déplacent vers d'autres arbres. Enfin, des pièges à phéromones peuvent être installés pour attirer et capturer les scolytes, réduisant ainsi leur nombre et permettant de surveiller l'évolution de l'infestation.


Piège à scolytes
Suspendus aux arbres, les pièges à scolytes attirent les coléoptères à l'aide de phéromones de synthèse

Le plan national français de lutte contre les scolytes


Face à la gravité de la situation, la France a mis en place un plan national visant à contenir et réduire les effets des scolytes sur les forêts. Ce plan repose sur plusieurs axes stratégiques.


Tout d'abord, le suivi et la surveillance des populations de scolytes sont essentiels. Des réseaux de pièges à phéromones et des mesures de contrôle sanitaire ont été renforcés dans les zones sensibles, notamment en forêt de pins et d'épicéas. Les autorités françaises ont également mis en place des protocoles d'alerte pour identifier rapidement les foyers d’infestation.


Ensuite, des mesures de gestion forestière sont mises en place pour renforcer la résilience des forêts face aux scolytes. Cela inclut la gestion de la densité des peuplements forestiers, la plantation d'essences plus résistantes aux attaques d'insectes, ainsi que la réduction du stress hydrique chez les arbres. Les forêts trop homogènes, en âge ou essence, sont particulièrement vulnérables aux scolytes. Le développement de la biodiversité dans les forêts, en favorisant des peuplements mixtes, est donc également une stratégie clé.


En parallèle, un soutien financier a été mis en place pour les propriétaires forestiers afin de les aider à prendre des mesures de lutte. Cela inclut des aides pour l'abattage des arbres infestés et pour la mise en œuvre de techniques de sylviculture durable.


Enfin, les autorités françaises ont travaillé en étroite collaboration avec des institutions scientifiques, des organisations environnementales et des professionnels du secteur forestier pour mettre au point des solutions innovantes et plus écologiques pour lutter contre ces ravageurs. Par exemple, des recherches sont menées sur l’utilisation des champignons entomopathogènes et d’autres agents de lutte biologique pour contrôler la propagation des scolytes sans recourir à des pesticides chimiques.


Les scolytes sont devenus une menace sérieuse pour les forêts françaises, en particulier à cause du changement climatique qui favorise leur développement. Les infestations massives à l’échelle régionale réduisent la capacité des forêts atteintes à fixer le carbone, pouvant temporairement les transformer de puits en sources d’émission. Cependant, grâce à une meilleure compréhension de l'écologie de cet insecte, à l'action concertée entre les différents acteurs du secteur forestier et à la mise en œuvre de mesures adaptées, il est possible de limiter les dégâts et d’assurer la durabilité des écosystèmes forestiers. La lutte contre les scolytes passe par une combinaison de gestion préventive, de lutte biologique et de gestion active des forêts, tout en respectant le fragile équilibre écologique des forêts. Enfin il est important de rappeler que les scolytes, considérés comme souvent uniquement des ravageurs, en particulier lors de pullulations, jouent également un rôle essentiel dans l’équilibre des écosystèmes forestiers et dans le cycle des nutriments en décomposant le bois.



 

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