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Créer un refuge pour la Nature

La préservation de la biodiversité revêt de multiples formes : de la sauvegarde de milieux naturels à l'accompagnement des espèces au travers d'actions de nourrissage ou de recréation d'habitats (hôtels à insectes, nichoirs, abri à hérissons...). Si laisser se développer une friche ou protéger une forêt sont des manières de la favoriser, il existe également des démarches volontaires bénéfiques permettant d'y contribuer activement. Voici quelques exemples pour celles et ceux qui souhaiteraient agir à différentes échelles.



Accueillir la biodiversité urbaine dans son jardin

Si zone urbaine et Nature semblent s'opposer, c'est sans compter sur l'extraordinaire capacité d'adaptation du vivant. Chaque zone laissée libre est aussitôt colonisée par les végétaux, les mousses ou les lichens. Observer la flore de son jardin, de sa cour végétalisée, prendre le temps de regarder les insectes ou les oiseaux qui nous entourent, ont aussi un effet bénéfique sur nos comportements. En apprenant et comprenant mieux le sauvage, notre volonté de le préserver se développe.


C'est ce rôle particulièrement important de reconquête de la biodiversité dans les milieux urbanisés que les scientifiques mettent aujourd'hui en lumière grâce aux citadins. Ainsi aider le vivant en le laissant s'installer, se développer, et en le favorisant au travers de comportements plus écologiques comme arrêter d'utiliser des pesticides, atténue significativement les effets délétères de l’urbanisation sur nombre d'espèces. Même un simple balcon permet déjà de semer quelques plantes mellifères. Un jardin en ville - si petit soit-il - a un rôle à jouer et contribue à renforcer la présence d'une biodiversité dans un environnement qui lui était au départ plutôt hostile. Si l'âme d'un jardinier ne sommeille pas toujours en chacun, laisser faire le vivant est aussi une bonne manière de l'aider. Au fil des saisons de nouvelles plantes, attirant de nouveaux insectes, feront spontanément leur apparition transportées par le vent ou les oiseaux. Et pour les plus motivés il est possible de 'booster' cette nature foisonnante en ajoutant des espèces locales variées (fleurs, aromatiques, variétés potagères...).


Grâce aux sciences participatives, les chercheurs du Museum d'Histoire Naturelle ont montré l’impact que les jardins privés d'Île-de-France peuvent avoir sur la diversité des insectes pollinisateurs, mais aussi les oiseaux ou encore les invertébrés. Malgré leurs surfaces réduites, ces espaces jouent un rôle important de par leur maillage à des distances relativement proches.


Si l'impact négatif de l’urbanisation, avec notamment l'artificialisation des sols, est malheureusement confirmée, l'importance des jardins privés a été validée au travers de la diversité des insectes qu'ils abritent. Le potentiel de ces jardins privés pour la conservation de la biodiversité est fondamental à plusieurs titres. En terme de surfaces végétalisées au sein des villes ils occupent une place non négligeable avec plus de 50 % en Île-de-France. Un véritable espace de préservation pour la biodiversité urbaine qui peut ainsi se maintenir voire s'y développer quand elle décline sur tout le territoire.



Favoriser le bois mort en tant que micro-habitat

Petits mais particulièrement riches, les micro-habitats sont de véritables écosystèmes miniatures qui offrent des conditions environnementales répondant aux besoins vitaux d'une ou plusieurs espèces vivantes. Il en existe de nombreux et celui auquel on ne pense pas forcément lorsque l'on dispose d'un jardin est aussi l'un des plus précieux : il s'agit de l'arbre mort. Que ce soit sur le tronc, dans ses cavités ou sous son écorce, ces arbres continuent d'abriter et nourrir toute une variété d'espèces vivantes, dont beaucoup sont menacées.


Conserver un arbre mort sur pied ou au sol sur son terrain permettra d'abriter mousses, lichens, champignons, insectes, oiseaux cavicoles ou petits mammifères. Ces espèces sont dépendantes des bois morts et celui-ci devient aujourd'hui une ressource de plus en plus rare. Nous avons tendance à ne plus le conserver pour des questions d'esthétique, de sécurité ou de préjugés comme celui de la prolifération des maladies ou des ravageurs. Pourtant ces dendro-micro-habitats sont surtout synonymes de biodiversité et offrent des conditions adaptées à des espèces spécifiques, dites saproxyliques. Favoriser le maintien de ces micro-habitats c'est également favoriser la vie du sol puisqu'une partie de ces espèces jouent le rôle de décomposeurs du bois et contribuent à sa transformation en humus.



Transformer son jardin en une oasis de biodiversité

Les jardins sont des espaces accueillants pour de nombreuses espèces animales et végétales. En milieu rural aussi il existe des manières de favoriser la biodiversité malmenée par les politiques agricoles et l'urbanisation. Si certaines espèces s’accommodent de conditions modestes, pour beaucoup d'autres, des conditions propices à l'implantation et au développement de leurs populations sont indispensables.


Deux volets complémentaires sont à privilégier : l'alimentation et l'habitat. Pour favoriser le retour d'espèces devenues plus rares, il est nécessaire de remettre en place des espaces d’accueil adaptés au mode de vie et aux besoins des oiseaux et petits mammifères. Et en parallèle de privilégier le retour d'une variété d'insectes, en adoptant par exemple des pratiques respectueuses du vivant : semis et plantation de plantes mellifères, mise en place d'un compost, suppression des intrants chimiques, arrêt de la tonte des pelouses, de la taille des haies au printemps/été...


Parallèlement - et ce afin de permettre le retour des petits prédateurs des plaines et jardins - voici quelques idées de réalisations concrètes pour aider au retour de cette biodiversité :



Créer un Refuge LPO

Qu'est-ce qu'un Refuge LPO ? Il s'agit d'un terrain public ou privé sur lequel le propriétaire s’engage à protéger la Nature de proximité et améliorer la biodiversité. Créer un Refuge LPO ne remet pas en cause les droits du propriétaire et ne confère aucun statut de protection particulier à l'espace labellisé. Cet agrément, créé en 1921 par la Ligue de Protection des Oiseaux, est devenu au fil du temps, le premier réseau national de jardins écologiques.


Cet engagement moral s'appuie sur les principes d'une charte prévoyant :

  • la création de conditions propices à la faune et de la flore sauvages, leur protection notamment durant les périodes de vulnérabilité (ex : nidification des oiseaux) et l'implantation d’espèces locales.

  • le bannissement des produits phytosanitaires et la gestion écologique de l'espace.

  • l'adoption de gestes écocitoyens, en utilisant par exemple raisonnablement les ressources naturelles (eau) et en recyclant les déchets ménagers (compost).

  • le renoncement à la chasse/pêche pour y favoriser la biodiversité.


Un Refuge LPO peut être mis en place aussi bien sur un balcon que dans un jardin privé (que vous soyez propriétaire comme locataire), mais peut également être déployé au niveau de l'entreprise ou de la commune. Un accompagnement spécifique est proposé pour chaque cas de figure afin d'adapter les préconisations et conseils aux situations.



Planter une micro-forêt urbaine

Vous souhaitez engager votre collectivité, votre entreprise ou même votre commune dans un projet à fort impact pour la Nature ? Avec un peu de volonté et l'aide de plusieurs dizaines de bénévoles, vous pouvez mettre en place la plantation d'une micro-forêt près de chez vous. Un tel projet nécessite avant tout de disposer d'un terrain d'un minimum de 100m2 qui sera par la suite préservé des aménagements futurs : la croissance d'une forêt demande plusieurs dizaines d'années. Une technique a essaimé dans de nombreux pays depuis le Japon et commence à être déployée en France, en zones urbaines, il s'agit de la méthode d'afforestation du Pr Miyawaki. Particulièrement denses de part la technique de plantation utilisée, ces forêts favorisent le développement d’une très forte biodiversité : végétaux, champignons, insectes, oiseaux et petits mammifères y trouvent rapidement refuge.


Les forêts Miyawaki concentrent une grande variété d'essences forestières régionales lors de leur plantation et se développent rapidement du fait des travaux préparatoires du sol. Elles sont particulièrement adaptées aux projets urbains réalisés sur des sols dégradés ou abîmés, et peuvent être réalisées dans des espaces délaissés (bords de route, friches, zones inconstructibles...). A la suite de leur plantation, elles demandent un entretien manuel (désherbage, paillage, arrosage) durant les 3 premières années puis deviennent totalement autonomes. Ces micro-forêts offrent de nombreux bénéfices au-delà de favoriser la biodiversité. Les arbres rafraîchissent l'air en été, réduisent la pollution sonore, stockent du carbone, améliorent l'esthétique visuelle du site... Pour développer ce type de forêts urbaines, l'association Etats Sauvages a mis à disposition de tous un guide complet et propose un accompagnement des porteurs de projets.


Mettre un terrain en refuge anti-chasse

Si vous êtes propriétaire d'un terrain ou locataire disposant du droit de chasse, vous avez la possibilité de vous opposer à cette pratique. Cette démarche est surtout bénéfique à la faune sauvage mais également à l'équilibre de l'écosystème au travers de la préservation de population de petits prédateurs tels que renards, blaireaux, rapaces...


De part son histoire, ses traditions et la loi Verdeille de 1964, tout propriétaire terrien sur le territoire français - et sauf opposition expresse - se doit d'accepter la chasse sur son terrain. Ce sont près de 45 millions d'animaux de 91 espèces différentes qui sont ainsi tués chaque année en France par les chasseurs. Pour refuser cette action, le code de l'Environnement demande un certain formalisme afin d'en informer les associations de chasse mais également les pouvoirs publics. Plusieurs associations écologistes proposent de l'information voire une aide pour cette mise en refuge.


Par exemple, l’association ASPAS accompagne cette mise en réserve des sites naturels privés pour qu’ils deviennent des refuges pour la biodiversité. La constitution d'un refuge anti-chasse est possible sur des surfaces très variables, de quelques milliers de mètres carrés pour un jardin à plusieurs centaines d'hectares pour un massif forestier. Il est nécessaire de signer une convention avec l’ASPAS, d'en informer la société de chasse ou l’ACCA et d'apposer des panneaux refuge aux limites du terrain pour l'indiquer au public.



Protéger une forêt, un étang...

Changeons d'échelle et prenons de la hauteur pour imaginer un projet de préservation de la biodiversité à un niveau local voire régional. Devenir propriétaire d'une parcelle forestière ou d'un étang semble de prime abord totalement utopiste, pourtant, en France, ce sont plus de 3,5 millions de personnes qui sont propriétaires des 3/4 de la surface de ces espaces naturels. Car seul 1/4 de nos forêts est publique et géré par l'ONF. Ce sont plus de 12 millions d'hectares qui appartiennent à des propriétaires privés avec des surfaces très variables, dont pour la moitié d'entre elles, des forêts de moins de 10 hectares.


Posséder en pleine propriété un espace naturel provient souvent d'un héritage familial, parfois d'un investissement, mais de plus en plus de passionnés s'y intéressent pour d'autres motifs. Ces projets ne sont pas forcément des aventures solitaires et des collectifs se rassemblent pour promouvoir la multifonctionnalité de nos forêts et surtout influer sur leur gestion. Refusant des pratiques destructrices telles que les coupes rases ou la plantation de résineux monospécifiques à la place de forêts anciennes. Des initiatives variées, plus respectueuses des sols et des espèces vivantes peuplant ces espaces voient le jour.



Chez Etats Sauvages nous avons choisit de nous mobiliser pour une préservation de la biodiversité forestière au travers du projet Forêt Sauvage. A l'instar de plusieurs démarches initiées par des scientifiques, des conservatoires ou des collectifs citoyens, nous avons décidé d'acquérir une forêt pour la soustraire à son exploitation par l'homme, lui permettre d'évoluer librement et de réaliser son cycle sylvogénétique complet. Avec ce projet, nous souhaitons contribuer activement à la préservation de la biodiversité forestière et notamment saproxylique (liée à la décomposition du bois mort), particulièrement menacée.


Sachez que si vous aussi vous voulez vous engager dans la préservation d'un espace naturel "grand format", acquérir un bois ou un étang est possible. Et si vous n'ambitionnez pas de mener un tel projet seul, pourquoi ne pas rejoindre une aventure collective engagée comme celle de Forêt Sauvage ?




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